Parole d’Expert par Mickaël Chiron. A travers une courte interview, il nous partage son parcours, sa vision de la création et son regard engagé sur l’évolution du métier de graphiste et de directeur artistique.

Mickaël Chiron débute sa carrière chez The Links en 2006, où il est d’abord embauché comme maquettiste. Il y évolue progressivement, devenant directeur artistique. En 2013, il rejoint l’agence GulfStream en tant que directeur artistique où il évolue jusqu’à gérer le planning et les freelance. Parallèlement, dès 2016, Mickaël commence à enseigner à l’AGR. Passionné par la transmission, il développe progressivement ses cours en sémiologie, graphisme et concept. Face à l’impossibilité de concilier l‘enseignement à l‘AGR avec son poste chez GulfStream, il devient en 2018 directeur artistique freelance, activité qu’il poursuit toujours. Son engagement pédagogique s’intensifie : au fil des ans, il prend de plus en plus de responsabilités à l’AGR et devient directeur pédagogique.

Tu peux découvrir ses créations sur son site internet et son Instagram.

Projet Webdesign - © Élodie Devant

« Être expert aujourd’hui, c’est continuer à évoluer, admettre qu’on doit encore et toujours apprendre. Tout change vite. Les tendances se contredisent, se renouvellent, se multiplient. C’est à la fois stressant, mais aussi stimulant, galvanisant. 

Depuis que je suis à l’école, je répète souvent la même chose : « C’est quoi l’idée ?« . C’est-à-dire que de nos jours, et encore plus actuellement, faire du beau c’est bien, mais donner du sens c’est encore mieux. Il y a plein de façons maintenant de faire du beau, il y a des gens qui vont le faire par l’IA, il y a des gens qui vont le faire par le graphisme, mais qu’est-ce qu’on a voulu dire, qu’est-ce qu’on raconte au fond ?   

Oui, l’intelligence artificielle nous fait gagner un temps fou, elle permet de produire plus, plus vite, parfois même mieux. Mais elle ne remplacera pas une vraie pensée créative, ni cette part d’instinct, de sensibilité, qui fait la différence.   

Quoi qu’il en soit, il faut toujours un regard humain. Ce regard critique, émotionnel, qui donne du sens.  

On l’a vu après le Covid : les gens avaient besoin de retrouver de l’humain dans les images. Les campagnes les plus marquantes étaient celles qui parlaient d’émotion, de lien, d’imperfection. Et en même temps, les marques n’ont jamais autant investi dans l’IA. On veut du vrai, mais on utilise du faux pour le représenter.  

 Regardez Apple.  

Tout le monde s’attendait à un lancement technologique pour Apple TV+, et la marque a pris le contre-pied. Ils ont sorti un nouveau générique entièrement fait à la main, tourné en studio, avec de vrais matériaux, du son, du mouvement. Un retour à la matière, comme pour rappeler que la créativité vient avant tout des gens, pas des machines.  

Et puis il y a la question écologique.  

L’IA a un coût : en énergie, en eau, en serveurs (Financier aussi en mutltipliant les abonnements).  

Utiliser l’IA, oui, mais avec mesure, avec conscience.  

C’est aussi une question de responsabilité, surtout pour les créatifs : savoir quand et pourquoi on utilise ces outils, et ne pas tomber dans la surenchère technologique.  

Dans cette logique, nous échangeons actuellement avec une startup nantaise qui développe une plateforme capable de regrouper plusieurs IA dans un seul abonnement. Nous n’avons pas le choix de former nos étudiants aux outils liés à l’IA, mais en participant à une économie locale et en les sensibilisant au problème écologique lié à cette dernière.   

L’idée, c’est de permettre aux étudiants d’expérimenter plus librement, sans se ruiner, tout en gardant une cohérence avec une démarche locale. Ce genre d’initiative montre qu’on peut associer la technologie à une conviction humaine, et que l’innovation peut rester accessible, réfléchie et responsable.   

On vit une époque passionnante, pleine de paradoxes.
On avance vite, parfois trop vite. 
Mais notre rôle, à nous créatifs, c’est d’observer, de comprendre, d’analyser. 
Parce qu’entre la machine et l’humain, ce qui fera toujours la différence, c’est l’idée. »